"Désirant et sidérant, si possible..." dit-elle.


"Désirant et sidérant, ...si possible !" dit-elle.

dimanche 28 février 2021

En lambeaux

 







L’esprit ne s’évade pas de son tumulte et la lampe s’inquiète.

Des reflets mauves sombrent dans nos mains.  

On tourne machinalement son regard vers la porte comme si elle devait

s’ouvrir. De quoi avons-nous peur ?

Une ligne de front s’est glissée entre les heures et on ne trouve plus sa place,

seulement une ornière.

Il n’y a pas de réponse à la menace qui nous blesse, ni au froid tout au fond du

ciel.

Bien sûr, un auvent claque sous le vent et les loupiotes flottent dans la rue.

Bien sûr, la table et la chaise restent en équilibre sur leurs pieds.

Bien sûr mais quand même.

Maintenant, la nuit part en lambeaux.


samedi 27 février 2021

Et que toute la gamme des bleus inonde la nuit !

 







Tout à coup on a soif,  d’eau et de promesses,

de beautés qui font mal, et de tonnes de regards suspendus

à l’amour qui nous traîne.

Sauve les rocailles dans le jardin.     

Et nos pensées se perdent, se rattrapent,

à des linges, une dentelle, un lac de sable là-bas.

On sent sa peau frissonner de baisers.  

Tout tremble à l’intérieur, le sourire de la vie,

un shopping du printemps, ou quoi d’autre ?

Du soleil sur du verre.

 

Laisser le ciel ne rien déranger aux monticules de vent dans les arbres.

Vouloir plus que tout le desserrement des ronces dans la fraîcheur.

Et que toute la gamme des bleus inonde la nuit !

 


vendredi 26 février 2021

La ferraille

 





On ne démêle pas le vrai du faux, ni le poids de l’ombre sur la lumière.

Sur le carreau, on suit le trajet des gouttes de la pluie. Lent et sinueux.

On cherche bizarrement à lire cette manière d’écriture,

à déchiffrer une vérité des choses et on ne sait pas quelles sont ces choses.

La nuit nous égare sur un chemin imprévu,

le silence est un simulacre.

Une marche d’escalier grince, une porte claque,

et un bruit de ferraille nous mord le cœur.




jeudi 25 février 2021

On ne raccorde rien à rien

 




Par moment la pluie s’essouffle, et on en lèche l’humidité sur nos lèvres

Une voiture passe dans la rue. Un passant, ou bien deux.

Alors on écoute, aux aguets d’un mot qui se serait perdu,

d’un mot ou bien deux, qui parleraient tout bas.

On invente des petites lumières dans les voix, un éclat de rire fragile,

peut-être un bégaiement, peut-être une plainte.

On ne raccorde rien à rien.

Une existence, un cœur qui bat, du sang dans les veines.

Qui diront quoi alors de ce que nous sommes vraiment,

de nos gestes du matin et de ceux du soir ?

De nos regards et des mots que nous ne disons pas ?

De ceux aussi que nous taisons ?


mardi 23 février 2021

Un papillon, une table

















Un papillon tourne sous la lampe,

se débat avec sa vie/sa mort. 

On le regarde chercher le jour, l'air du jour, l'odeur du jour,

dans un paysage d'herbe et d'eau, 

une respiration relevée de la terre,

peut-être une table où s'appuyer. 





La nuit nous serre dans ses bras

 



La nuit nous serre dans ses bras.

On le sent à l’estomac.

On s’émeut de l’odeur du vent sur l’oreiller,

d’une autre peau dans un pli sur le drap.

On ne se défend pas de s’enfouir dans cette douceur qui nous rend plus

 humain avec nos cœurs tout dépeignés.  

Les heures, un moment, oublient leur épaisseur fragile,

et il n’y a plus que des noctambules magnifiques à être là,

quand la fumée entête nos mémoires.

On croit au  silence pour se sauver du bruit.

On croit au soleil pour crever les plafonds.

Aux mots qui parlent tout bas

et au verre de vin pour se moquer de tout.

En vrai, on se moque de rien.


lundi 22 février 2021

Le bleu des ombres

 







Des senteurs d'osmanthe s'échappent d'une bougie et brûlent nos fatigues.

On tête une fumée pâle qui se dissout dans l'air sans trace, un ruban à

l'horizontal dans lequel se blottir.

On se recroqueville autant qu’on se colle au désordre du ciel et à son chaos.

On pense qu’il faudrait écrire sur une feuille, dans la marge,

«  Nuit 3h 15 »

pour ne pas oublier,

le café dans sa tasse et la cigarette,

la cire sur la nappe,

tous les mots étranges sur un bout de papier,

l’orage qui lève,

et le bleu des ombres qui pleuvent sur nos vies.

 



dimanche 21 février 2021

Sans repos

 


                                                                               Photo | Brett Walker




Le carrelage froid donne corps à l’orage qui claque,

et nos histoires nous reviennent en pleine figure.

On cherche un endroit dans la maison où les mettre à l’abri,

loin des bruits du dehors, et de ce qui nous remue.

On ne sait pas bien où se réfugier.

Car tout bascule autour de nous, tout est noir dans le jardin.   

On ne voit rien au-delà du fil à linge.

C’est tout juste si les yeux osent creuser là-bas, à la limite du ciel.

On s’inquiète pour le chat qui a oublié de rentrer.

Pour tous les chats de la terre qui errent après leur ombre

dans un vieux monde qui recommence.

Sans repos.

 



vendredi 19 février 2021

Une musique en douce





Nous qui voulions être un papillon, voilà qu’on s’agace de la pluie

qui saute sur les tuiles et abîme nos rêves.

Peut-être que nous sommes un fardeau à la nuit, et

que nous l’encombrons avec nos corps fatigués et nos yeux ouverts.

On a le sentiment d’une défaite à être encore là,

juste pour que le vent nous veille.

On imagine un homme penché au-dessus d’un précipice sur un sol

glissant. Il sait qu’il va tomber,

il sait absolument qu’il va tomber, mais il reste là.

 

Ecarter les inquiétudes. 

Repousser ce qui embroussaille le cœur.

Des petites bêtes chassées d’un revers de la main.


On voudrait bien qu’une musique entre en douce dans nos yeux.

 


mercredi 17 février 2021

Des feux






On avance contre le jour et le café brûle sur la langue.

On prend à présent le temps de la lenteur dans nos gestes.

Comme on arpente une colline en faisant des pauses.

Comme on cherche ses mots dans un terrain vague.

Tenir et garder. Regarder et retenir.

On construit toujours des feux sous la pluie.

 



mardi 16 février 2021

Loin proche


                                        De loin en loin, dit la haine

                                     De proche en proche, dit l'amour





lundi 15 février 2021

On dirait des oiseaux


 

Des mots nous traversent,  comme "vertige", comme "diluer", comme "voir la mer",

ils glissent le long des murs et se collent contre nos ventres.

On les tient là, serrés.  

Même si on sait que la nuit hypnotise nos tendresses, on ne s'en méfie pas.

On imagine déjà demain, la route à faire, et le soleil entre les arbres. 

Et puis deux mains rassemblées dans l'univers qui croule,

les doigts noués aux doigts, de vrais inséparables,

parce que de loin, sûrement qu'on dirait des oiseaux.


vendredi 12 février 2021

Zones floues




    







La nuit a besoin de zones floues pour rester la nuit. 

On a la sensation de marcher en crabe

sur un chemin dessiné de travers.

On jurerait qu'il penche. 

On se sent un peu ivre sur des jambes de paille, 

comme dissous. 

La pluie a trop rongé le ciel et nos gestes ont blanchi. 

 

Faudrait des feux quelque part pour les impasses,

des clignotants orange, des signes,

des musiques de signes pour entendre passer,

incognito, un soleil sous la porte.

Faudrait que la ville luise et reluise encore 

dans les halos et les phares des voitures, 

dans nos yeux, et sur les bateaux du fleuve, 

n'importe comment,

échoués dans la chambre.

 

Finalement tout est à sa place. 

Tout nous suffit.



 





   

                                                         

       

        

       





mardi 9 février 2021

Parfois les yeux s'éteignent









Parfois les yeux s'éteignent et on croit qu'on meurt.

Alors on se tient sur les gardes de sa fatigue, 

on évite ses pièges, des crevasses qui nous feraient tomber.

On marche dans la chambre, une flaque de lumière sous les pieds.  

Elle ricoche dans les mains et

on la caresse comme une preuve de ce qui entame.

On fait un tour de jardin à l'intérieur de soi,

 et on laisse le vent aller/venir entre ses lèvres,

se coucher où il veut

dans un coin de sa bouche.

 


Ouvrir et fermer les yeux plusieurs fois et très très vite.

Voir des couleurs, des clignotants orange 

qui se déplacent dans l'air,

qui brillent 

et qui servent à rien. 


 

 


dimanche 7 février 2021

Lumière ocre et bizarre


                                                         Photo | Sabine Weiss



Une lumière ocre a glissé sur le silence des toits

et a continué à peu à briller dans son brouillard. 

La nuit dure longtemps quand rien ne bouge à travers les fenêtres.

Le vent s'est perdu dans la poussière de sable 

et les yeux ne savent pas où trouver refuge. 

Ils piquent sous les paupières si on ne les distrait pas,

si les pensées trébuchent au lieu de courir 

devant soi.


  


vendredi 5 février 2021

Un tour de quartier


 


On reconnait le chemin sous la lampe, les rues.

Les rues d'une ville où des visages  se tiennent sur le devant des portes, 

collés à des vitres,

serrés à un souvenir revenu de nulle part.

Le tien est sûrement parmi eux, mais tu ne sais pas bien où.

Tu fais un tour de quartier en voiture, 

tu longes le fleuve et l' autoroute du tram,

deux flèches plantées le long des quais et

jetées là exprès pour bercer le cœur. 


 C'est beau et triste ces milliards de silences,

ces milliards d'âmes et tous ces frémissements entrecroisés,

des désastres, des sommeils et

l'éternel égarement humain comme un courant à remonter.


 

 

 



mercredi 3 février 2021

Quand elle penche

 






Tu sais le poids de la nuit

quand elle penche et s' efface

sur une épaule

absente

sa couleur endormie.



Une tasse de café au lait et le vent,

poing levé, ivre, pour croire au monde,

mon corps au milieu de sa racine tordue,

et le pouls du jour en cordes lisses,

des chinoiseries au territoire du désir

et des pensées brouillonnes,

à l’échappée de soi,

ce  que l’on veut toujours tu sais,

toute une route à suivre,

à tomber

mille et une fois,

une alerte de l’émotion tenue à dix remparts

du naufrage,

dans la nuit aux lumières attentives,

et, dans l’écho de la lampe,

une étoile écorchée,

quand l’écriture devient voix.