"Désirant et sidérant, si possible..." dit-elle.


"Désirant et sidérant, ...si possible !" dit-elle.

jeudi 29 janvier 2015

Dans nous, pleut.




Il pleut des canaux, des bocages.
Ça verse à torrents.
Essore des chiffons sales.
Le ciel n'a pas d'alibi.
Pleut. Re-pleut. Pleut. Pleut.
Pleut la pluie qui pleut.
Corps alourdi des bras. Pleut.
Les grands bras. Et la pluie pleut.
La terre déployée
et tes bras,
grands,
pluie,
pleut.
Dans nous, pleut.


(Extrait de "Seulement la vie, tu sais")









dimanche 25 janvier 2015

Je l'ai rencontré | Wolinski 95

Il est temps pour moi maintenant de rendre hommage à Georges Wolinski.


Octobre 95, je participais de façon très active à une revue littéraire, Le bord de l'eau. Je rencontrais des gens, je présentais des livres, je tenais chroniques, j'écrivais. J'allais vers qui me plaisait. Et j'adorais ça.
Ainsi, au Salon du livre de Bordeaux, cette année-là, je me suis allée voir Wolinski, invité pour sa nouvelle bande dessinée "Nous sommes en train de nous en sortir", éditée chez Albin Michel. Je ne savais pas qu'il serait là. Je n'avais rien préparé. Et ce n'était pas plus mal. Il aimait l'audace et j'en avais. Le moment fut beau, chaleureux, amusant, la parole ouverte sur ses choix de vie et ses détestations, des légèretés qui n'en étaient pas tant.
J'ouvre la revue.

Je me souviens.
De Georges Wolinski assis derrière son stand avec l'air de vouloir être ailleurs, de ses yeux perçants et dedans une petite flamme qui mord comme de l'intelligence qui se verrait, de son sourire en forme de "i" bancal, une contenance qu'il se serait dessinée sur les lèvres, de ses mots sans triche, sans court-circuit, pas onctueux du tout et c'est tant mieux, de ce quelque chose qui ressemble à de la lassitude, et dans laquelle moi j'ai voulu voir de la fragilité d'un être.

Je me souviens du dessin qu'il m'a fait et je l'ai trouvé rigolo.






Je me souviens que mon appareil, une sorte de dictaphone vieillot n'a pas fonctionné, que nos mots se sont dissous dans le néant, et que ma voix a vacillé quand je m'en suis rendue compte.

Je me souviens que j'ai écrit à Wolinski aussitôt après, lui proposant, s'il le voulait bien, de dresser pour "Le Bord De L'eau" une sorte d'inventaire futile.

Je me souviens qu'il a voulu.

Alors voilà ce qu'il m'a répondu. Ex abrupto tout est là, le geste et l'écriture.






Merci à toi, Wolinski !



vendredi 16 janvier 2015

Terre à Ciel | janvier 2015


Pour ne pas oublier. 

 http://www.terreaciel.net/Janvier-2015?var_mode=calcul
 http://www.terreaciel.net/

Terre à Ciel publie un beau numéro, en ce mois de janvier. Allez  y jeter un œil, ou même deux...
Un de mes textes y figure, entouré de belles plumes,  pour une mini anthologie  sur le voyage "Destination inconnue"
.http://www.terreaciel.net/Destination-inconnue-poemes-sur-le#.VLjv13spqMI

Je remercie toute l'équipe de la revue et en particulier Cécile Guivarch et Sabine Huynh.
Voici mon texte.





On croirait le désert, ces longues routes à la nuit.
Les obsessions traquent les ombres des hommes.
Ils vont à la fenêtre, inclinent le haut du corps et voient ce que nul n’atteindra plus jamais.
Sans défense, le voyage est possible, nous, dans le train de la partance et
"- Après on meurt parce que plus rien ne sera aussi fort.
 On sera comme des fous."
Le monde attend des miracles, et on trimballe ses peurs,
le froid contre les dents, les rages des enfants tranchées au vif,
les jours gris et les cris qui s’étouffent.
Le voyage se lit à la flamme des patiences, et des mots fulgurants.
Demain, l’essentiel nous sera rendu, à genoux dans le train.
L’espace me noie, je m’égare, je me trompe de trajet. J’avance toujours vers toi.
Le paysage est une mauvaise herbe dans le monde qui plie.
Sur les parkings, les cartons entassent la misère et les baisers gâchés/perdus.
Le gouffre de l’angoisse gronde sous nos pieds,
les enseignes rouges, dans la nuit, mâche des torrents, je te donne !
toutes mes indulgences
pour un visage.
Je cherche la lumière, et là-bas, des loupiotes,
alignées dans mes mains,
sur des kilomètres de feuillage.




lundi 12 janvier 2015

La tristesse en marche un 11 janvier


Bordeaux 11 janvier 2015, la marche est historique. 140 000 personnes se sont mobilisées et se sont rassemblées Place des Quinconces.

Il fallait que cela ait lieu. L'important est que cela ait eu lieu.
Au-delà de toutes les postures politiques, être là. Citoyens, juste être cela, sans entrer dans les discours de récupération des uns ou des autres... Juste nous, citoyens, humains, avec nos âmes et nos cœurs.
 Les mots de solidarité, tolérance, fraternité, liberté, laïcité ne font rire personne aujourd'hui.
Le cynisme esthétique n'a pas de place.
Il fallait que cela ait lieu.

Journée bien étrange pourtant, qui s'est endormie tard sur une immense tristesse...
Le monde, tout ce monde, dans toutes les villes de France, dans une même cadence de la marche, en mémoire de ces êtres de notre culture disparus parce qu'ils s'exprimaient librement, des inconnus autour d'eux, et de ceux qui se sont trouvés au mauvais moment au mauvais endroit...
La vie continue, un pas après un autre pas.

Qu'en sera-t-il de tout ça demain quand les mots de l'analyse prendront le relai de l'émotion ?
Quel sens sera donné à cette commémoration exceptionnelle ?
La venue des chefs d’États à Paris où plus de 2 millions de personnes ont marché ensemble n'avait pas pour but de défendre la liberté d'expression, (certains d'entre eux ne s'y entendent pas beaucoup en la matière, hein !), mais de s'unir contre l'obscurantisme islamiste et c'est déjà pas mal.

Journée bien étrange pourtant, avec cette tristesse accrochée au cœur...

Parce qu'on sait bien que ce qui s'est passé ici, chez nous, a été permis par des conditions politiques, sociales et éducatives en déliquescence, que les "brutes fanatisées" qui ont massacré ici sont des enfants de France, nés ici, et français.
Ils ne viennent pas d'un autre monde. Ils ne sont pas idiots, pas forcément idiots, ce serait finalement tellement rassurant et si simple de les penser aussi bêtes qu'une kalachnikov !  La barbarie n'est jamais dépourvue d'une forme d'intelligence froide, dénaturée, mais réelle
Mais encore faut-il savoir regarder les failles de notre société, ses manques et ses blessures, pour nous aider à faire le deuil des 17 morts de cette semaine.
La montée de toutes les haines, c'est ici, les oubliés, les désespérés, les ignorants, c'est ici, 
et les "barbares" de Charlie Hebdo qui n'ont que la justification de détenir une Vérité divine et l'illusion d'être justes, au nom d'un dieu vengeur, se sont construits ici.  
  On voudrait ne pas y croire ! On voudrait juste que cela ne soit pas vrai.   
 ...Il n'est pas l'heure de les déresponsabiliser de leurs actes, mais il est urgent de se responsabiliser de nos politiques qui les abandonnent depuis des lustres à leur mauvais sort, ces "racailles" des banlieues, ainsi que  Sarkozy les nommait.
Les têtes sont bien fragiles dans un monde qui gronde, appauvri, et dont la lisibilité se perd. 

Pour eux, pour eux tous, assassinés absurdement, "Je suis Charlie".




jeudi 8 janvier 2015

7 janvier 2015, le jour à bout portant

7 janvier 2015.
Le jour est atterré par l'absurde et le sang. 
Charlie Hebdo a été pris pour cible par des fous furieux,
au nom d'un dieu imaginaire, sanguinaire et vengeur. Ils ont massacré....

Des hommes ont été abattus froidement, salement méchamment.
Les dessinateurs Charb, Wolinski, Honoré,Tignous, Cabu sont morts, Bernard Maris l'économiste aussi,  le correcteur Mustapha Ourrad, deux collaborateurs du journal Elsa Cayat et Frédéric Boisseau, ainsi que Michel Renaud, invité à la conférence de la rédaction ce jour-là, et puis deux policiers Ahmed Merabet et Franck Brinsolaro.

Qui sont-ils ces assassins, habillés de noir et de cagoules, la kalachnikov brandie comme une grandeur de l'enfer, qui tuent froidement et ramassent une basket après le massacre ?

Ce n'est pas la religion que ces assassins défendent.
Aucun dieu ne réclame le crime.
Ils tuent la vie, la liberté, l'humain,... et l'humanité en eux.

Stupeur et tremblement.
Les mots manquent quand la bêtise et la haine anesthésient les yeux.
L'épouvante coupe la respiration.
On cherche Charlie quelque part. La beauté quelque part.
Le monde coule vers le soir comme tous les autres soirs.
Mais il fait bien sombre dans le silence dedans.
Les rues sont plus longues que d'ordinaire,
la violence ne se dissout dans rien.
Même le vent, même la petite pluie ne savent pas la chasser.
Le ciel se tait.
Puis.
Des enfants jouent au ballon sur le trottoir.