"Désirant et sidérant, si possible..." dit-elle.


"Désirant et sidérant, ...si possible !" dit-elle.
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vendredi 12 septembre 2025

Mouvements


 


 Mouvements de la main
tendue, 
devant soi contre la peur
ou une alerte.

Mouvements du jour,
ses soupirs,
étirés rompus sur les épaules,
parfois ils pèsent.

Mouvements de la lumière
sans rechigner,
les gondoles du ciel
au quatre coins,

autour des fissures 
des murs et des mots, 
un noir et leur pelure

Mouvements de la pensée 
informe, qui saute mouton,
rejaillit d'elle-même,
et même.

Mouvements du regard
qui veut dire,
dans le jardin cherche un banc
qui veut 
puis abandonne.

Je note : te retrouver  (mais où ?)
               quand je (me) perds.

vendredi 11 octobre 2024

Indigo, c'est le titre | Jean-Christophe Belleveaux

  




Le livre de Jean-Christophe Belleveaux "Indigo, c'est le titre" vient de paraître.  Il regroupe quatre moments d'écriture : indigo, c'est le titre, puis l'apnée, les fleurs, suivi par se peut-il ? et enfin fenêtre (sans majuscule). Le recueil est un ensemble de temps inséparables aux marges poreuses qui se répondent, se complètent, et s'enrichissent, traversé d'une sorte de mélancolie douloureuse et tendre.   

D'abord  une photo en couleurs, avec des rouges et des bleus, surtout des bleus, un chien maigre arrêté, du temps suspendu où le ciel s'accroupit parmi les hommes. 

Et nous nous tenons au seuil du voyage, de Nevers jusqu'au fleuve, c'est peut-être le Gange, mais où est-ce vraiment ? : mouvements d'images dans nos têtes, de corps qui se déplacent, silencieux on dirait, un lent balancement des arbres et de femmes en sari. Alors on lit la route qui ne finit pas, un long déroulé de nuits et de matins, un trajet "qu'on n'enfermera jamais", dans les pas de qui ?

Un chemin, des mots. Finalement, c'est presque la même chose. Des traces quelque part. Nous sommes si peu. 

Belleveaux est un arpenteur contemplatif des odeurs, des couleurs et des êtres, aux yeux ni aveugles ni sourds. Il regarde et écoute. Écouter, c'est accueillir et faire exister l'autre, je crois cela. Quand on écoute, on partage quelque chose avec quelqu'un qui s'expose.

"...moi envolé
avec les aigles le chanvre
flottant dans le cobalt
plus impassible que les fleuves"

Simon Leys écrit "Il faut dire ce que l'on voit, et, ce qui est plus difficile, il faut voir ce que l'on voit". 

Si Jean-Christophe Belleveaux cherche les beautés de la vie, sous les rudesses de la vie,   "la vie soyeuse / comme une panthère", il sait aussi que les mots bavent sur la page, savent pas dire, trop peu, la vieillesse qui pointe son museau et le monde tout déchiré qui vacille. "la corneille du désespoir croasse"  temps vécu, temps mort disparu.

 Les mots sont des horloges sans heures justes, mais pourtant inexorablement nécessaires, des outils à garder, à soigner, à aimer. Pour vivre dans la langue, nous n'avons qu'eux. On se débrouille. Avec l’éthique des princes de la poésie qui ne se vendent pas. 

aux académies honnies

j'ai toujours préféré les sales trognes

j'avais deux pieds sur lesquels me tenir

je maintiens la position

...

 "Dilapider les mots / Égorger la phrase"

...

Ce sentiment que tout est là | voilé/dévoilé | suspendu | cette bulle prête à éclater | tous les mots | coffres pleins | la brûlure des mains | l'apnée

Comment dire ce qui a eu lieu, les grandes déchirures dans nos yeux, et nos regards à jamais sidéré ? Se peut-il ?

il n'y a pas n'y aura pas 

de cohérence se peut-il 

après Tuol Sleng Auschwitz Kigali

 Jean-Christophe Belleveaux  n'en a pas fini avec la mémoire de son grand-père qui hante sa mémoire, lui qui ne sait pas jouer du violon, et une rage le prend   quand la maltraitance de la pensée / dresse sa trique maladroite et douloureuse  Car la folie des hommes agit continûment. Le désastre du monde traîne dans les jambes, et on pourrait bien avoir envie d'en rester là, tout est seuil est linceul, laisser tomber, oublier la dégueulasserie ordinaire de vivre. 

Tout un désespoir ramassé dans un seul vers

                                            et un chien : qu'est-ce qu'on en fait ?

Mais non, pourtant non ! Il fait bleu, il ouvre la fenêtre, en grand, avec au bout des yeux un sac d'étonnement et d'amour, ceci dit sans mièvrerie qu'on pourrait reprocher. 

Jean-Christophe Belleveaux se resserre sur ses affaires, à portée de mémoire et de main. Sur ce qui le tient, son peu à lui qui dure. 

je voudrais ma fenêtre ouverte

sur le bleu qui clapote

quelques oiseaux marins du café

le désordre des cheveux le pli des draps

une rose peut-être

presque fanée

douloureusement blanche et précaire

dans le petit vase ébréché


Jean-Christophe Belleveaux Indigo, c’est le titre. Montréal : Pierre Turcotte Éditeur, Collection Magma Poésie, 2024, 81 p

 La version papier du livre est en vente sur les sites Amazon. Vous devez acheter le livre sur Amazon. Il vous sera envoyé par la poste.

https://www.pierreturcotte.com/post/indigo-c-est-le-titre-de-jean-christophe-belleveaux 

 

jeudi 29 août 2024

La revue Europe et "Toutes les nuits sont pleines de lunes"

 

La chronique de Dominique Boudou sur mon recueil "Toutes les nuits sont 

pleines de lunes" aux éditions Al Manar est parue

dans la revue Europe. Une revue de référence 

dans le monde littéraire que je reçois ce matin. 


Un b
eau papier, comme Dominique sait faire,     

que je relis une fois / deux fois et plus encore,  

...je l'embrasse une fois, deux fois et plus

encore.

 

Et, petit clin d’œil au prix que j'ai reçu il y a 

quelques années, Jean Follain est à l'honneur du 

numéro. 

Lui qui s'est tenu toute sa vie à l'écart des courants, il écrit sans affèterie 

l'apparente banalité de l'existence et nous transmet une poésie du réel qui 

semblait insaisissable. 

 


 

 

 

Voilà, tout me va ! Je suis chanceuse et flattée de

 ce que je veux bien prendre pour une petite 

reconnaissance des mots que je trace ici et là.


 

 

 

 Je vous livre le texte de Dominique sur mon recueil, comme il l'a aimé.





 

mercredi 27 mars 2024

Toutes les nuits sont pleines de lunes | Editions Al Manar



 La poésie est au service de la vie, et ne parle pas d'elle-même, elle nous parle de nous, de nos existences, de nos angoisses, et des beautés dedans. 

 Ce texte, "Toutes les nuits sont pleines de lunes", est une trajectoire de la nuit dans la nuit qui nous traverse.  

Les mots tâtonnent sur un territoire intime, comme à l'aveugle et accrochent juste les bords d'une parole idéalement saisissable.
Mais on n'est sûr de rien avec les mots. Tantôt ils se perdent, puis trouvent un souffle, une palpitation.
Il n'y a pas de chemin de révélation. 


Toutes les nuits sont pleines de flou, de lune floue, c'est pour cela que l'on fait récit et que l'esprit galope, se perd, chemine aussi avec beaucoup d acuité.
Je rejoins ce que dit Antoine Emaz qui "aime à penser la poésie comme un lichen ou un lierre, avec le mince espoir que le lierre aura raison du mur." Car parfois on a honte d'appartenir au genre humain devant les grandes violences que les hommes font à d'autres hommes. On se demande ce qui ne va pas avec l'être humain ? Pourquoi depuis 2000 ans l'homme n'a pas changé ? Pourquoi l'homme se comporte comme ça ? Pourquoi chacun porte sa propre monstruosité ?
C'est dire que la poésie ne change rien à la marche du monde, mais elle en est un témoin fragile, lucide, vivant. Elle honore toujours ce que la vie a d'immense.


Je remercie les ami(e)s qui sont venus me voir, m'écouter, ceux qui ne pouvaient être présents mais qui me suivent toujours, les inconnus qui ont acheté le recueil, et en particulier la toute jeune fille qui est venue me voir avec son papa  (c'est bien là le plus chouette !).

Je remercie bien sûr Alain Gorius qui me publie ici pour la deuxième fois. Je mesure la chance qui est la mienne de l'avoir rencontré et de trouver auprès de lui un regard très confiant. Il était présent lors du Marché de la Poésie pour la première lecture publique, la première présentation du recueil. 

 

 

Je remercie tout particulièrement mille et une fois Véronique Lanycia dont les photographies et le talent accompagnent le recueil. Son univers poétique me plaît depuis longtemps. Vous le verrez, ses images apportent au recueil un complément de sens, le texte et l'image dialoguent, c'est dire si l'œil aussi a sa part de lecture. 

 

 Je voulais que, dans ce livre, on sente des temps heurtés, des tensions, des apaisement, des incertitudes, des tendresses, des petites lumières dans la nuit, ...  jusqu'au matin.

Le recueil peut être commandé en librairie ou 

ici, sur le site des éditions Al Manar, si vous le souhaitez.

https://editmanar.com/book-author/giraud-brigitte/

 https://editmanar.com/editions/livres/toutes-les-nuits-sont-pleines-de-lunes/



     




samedi 16 décembre 2023

"Les lointains" / Jean-Cristophe Belleveaux

 

 

 

  Un nouveau texte de Jean-Christophe Belleveaux, "Les lointains", vient de paraître aux éditions Faï fioc. Mais qui sont-ils vraiment, "ces lointains" ? Jean-Christophe Belleveaux dit que ce sont "guenilles de géographie, morceaux de l'être, éparpillements".

De fait nous voyageons dans le recueil, ici, là, dans l'espace et le temps, de Thaïlande en Erythrée, croisant des longitudes 1 et 2, une dérive des continents, des ailleurs, et des années.                     Nous entrons avec beaucoup de précaution dans un territoire intérieur où vivre est un étonnement, et vieillir une drôle d'histoire. 

Voir, écouter, sentir tout ce qui existe, sous nos yeux, est sans doute ce que le poète considère être la seule façon d'honorer le vivant. Aimer ce qui est et qui restera, les arbres, les paysages, la mer et le vent, et tous les êtres qui ne sont plus, demeurés quand même en lui, les parents d'avant ses enfances, cette année 58 et le labeur des hommes aux usines et à la terre, ses compagnons de route aussi, ses nourriciers du verbe. Puisqu'il écrit. 

J'écris dans ce qui pourrait être un poème, le cheval supposé qui rejoint le moule de sa dernière posture, j'écris la route bordée de platanes, les bicyclettes Peugeot, j'écris la terre qui rudoie les hommes et les nourrit, l'usine et ses cheminées, j'écris les salaires insuffisants.... Je n'ai presque rien à raconter mais je ne peux me détacher de la page. Les mots voudraient dessiner encore l'acier qui résonne, l'usine comme un ogre, les chevaux morts, les oiseaux qui ne savent rien.

 Jean-Christophe Belleveaux se souvient. La mort est effrayante. Alors, tant qu'il est encore temps, il faudra être, vivre et être, non assujetti au médiocre et à la ténèbre. 

 Point de frein : souffle sur la braise, mords, ose le sourire et le cri

Il va falloir marcher dans la neige, marcher Vers des hasards fabuleux et griffer mes nerfs Ouvrir les tenailles de la journée ouvrir Quelque chose ou pas c'est affaire de paupières La grise majesté des nuages cavale Vers quelque point cardinal je fume en silence Las ! Las ! les vieilles lois mordent dedans ma chair Que viennent des vents qui renversent les enclumes Quoi suffit ? Je veux moi une vie de trappeur Rien ne suffit ni l'océan ni l'envergure Je verse dans mon verre de l'encre du vin La peur atroce et la féroce liberté

 Le recueil de Jean-Christophe Belleveaux a parfois des accents peréquiens. Il cite des lieux, il associe une musique à un vin dans ses 9 poèmes à lire dans les collines, il nomme comme autant de petits haïkus autour du mot table ce qui a lieu autour, de ciels, de chiens, de bruits, 19 mouvements très ordinaires et précieux. 

table / là / présence incontestable / table de jardin / les cerisiers du voisin penchent

Table / sur laquelle je pose mes deux coudes / me penche au-dessus du carnet / puits / enfin où sombrent les questions

Tout tenter de saisir ce qui a lieu, puisque tout signifie. Quelque chose de soi. 

Ce sont de mini-scènes de vie, comme dans le beau texte La pluie,  

Cela  dégringolait, rebondissait, ravinait les plates-bandes et les allées ; ce bruit terrible vous enroulait dedans sa cape et vous étiez un petit enfant. 

des moments notés comme dans un journal du Puerto Barrios J'ai, j'ai, j'ai quoi ? 

J'ai les oreilles pleines de sirènes de paquebot...J'ai un sacré courage : descendre de la terrasse en bois au-dessus du cinéma... J'ai l'hésitation du bègue l'écriture qui titube pour finir les bras en croix tels les empereurs borrachos de Puerto Barrios 

des incidents peut-être comme autant de  contemplations articulées en textes qui interrogent le langage. Car comment dire la beauté et la peur ? La nostalgie  et le compte à rebours ? Comment se rejoindre dans le mouvement des choses où les pensées vacillent ? 

Dans la longue attente, tout importe : la présence en pointillé d'une tourterelle , pfft, elle est envolée, mon cœur bat, serré d'une angoisse ténue, une poignée de secondes à mettre dans un écrin 

Y'a -t-il dans la langue une région quiète, un rivage où s'étendre, le souffle délivré, le corps à l'air accordé     

Voilà, les choses se tiennent là, près de soi et en soi, toutes concrètes, nichées au creux des mots qui ne trichent pas. Les livres et les mots peuvent sauver, et je serais prête à parier que Jean-Christophe Belleveaux l'a été à un moment de sa vie. A l'heure des écrans et l'âge venant, on en sait mieux la puissance et la nécessité.

Le texte qui ferme le recueil est un long poème en forme de "je me souviens", qui égrène les noms de disparus, où Franck Zappa voisine avec Clovis 1 roi des Francs, Eva Braun et Rimski-Korsakov, la contesse de Ségur, Lady diana et Mata Hari. C'est une évocation de nos années de jeunesse et l'inventaire d'un temps passé quand la vie allait, quand maman n'était pas morte, ni l'oncle, ni le fils du voisin, ni la petite chatte noire et blanche. Mort mort mort  ! tous morts !  Et nous bientôt, enfermés pareillement dans un nom au bas d'une liste. Nous tous, les enfants vieillis que nous sommes, à se demander étonnés et têtus

qu'est-il advenu de l'été (les folles graminées, l'enfance) qu'ai-je fait de mon corps, et cette obligation de séjour inquiet ?


Je n'y comprends rien de rien de rien,

merci,

de rien,

merci. 

 

Avec "Les lointains", Jean-Christophe Belleveaux signe un  très beau recueil.  Merci la vie !

jeudi 12 octobre 2023

S'affale mon coeur sur le goudron noir

 

Ce n'est pas que le regard soit verrouillé par le soleil dans la rue,
zone libre conscience floue, les gens courent leurs affaires.  
Le jour est tombé par effraction d'un bloc,
les yeux ont coulissé sur la lumière, glissé sur l'évidence de la lumière,
et l'envie de bleu pur ripe aux bateaux des trottoirs,
s'affale mon cœur sur le goudron noir.

samedi 12 novembre 2022

L'ivresse du loin


 

 

 

On touche la fraîcheur de la nuit tombée sur la route et les toits,

l’ombre d’un homme égaré là-bas, d’un chien peut-être.

On lave ses yeux de l’inquiétude.

On se rapproche du bleu,

le corps vacille dans l’ivresse du loin.