Il est parti dimanche matin, ailleurs, un peu plus loin du monde. Ce 7 décembre 2025.
Je ne sais pas comment faire avec ce lointain-là. Je ne sais pas.
Juste que le chagrin fait mal et qu'en dissiper l’amplitude ne sert à rien.
Un petit bout de moi s'en va en même temps que lui
et les mots sont étroits.
Sans doute n'ont-ils pas la force d'être bavards.
Tant de livres, de vidéos, de musiques, tant d'images, de petits crème, de
cigarettes, tant de lieux, Bordeaux, Paris, Alger, Claouey, la mer et le sable
filé entre les doigts.
Des dates sur un calendrier,
Des allers et des retours. Des naufrages et des incandescences.
Des grands bras, je te dis.
On pourrait croire à une parenthèse ouverte du temps.
Est-ce qu'on marche toujours dans ce qui s'éteint, et vient encore ? Oui, bien sûr, bien sûr.
C'est un souffle du vent, ou juste l’ombre d’un souffle de vent, qui attendait dans la mémoire.
Une respiration.
Comme si, de l autre côté de la rue, il m'offrait tous ses mots, dans ses mains.
Ce qui ne peut s'écrire.
A présent, il laisse ici ses revues et ses livres, ceux qu'il a édités et
ceux qu'il a écrits, ses amis, ses amours.
Il laisse là ses rires et sa voix, un fond de Martini rouge,
Léo ferré Amour/Anarchie, Duras, Proust et les autres,
son chapeau.
J'imagine pour lui des beautés folles, des taches vertes et bleues sur l’océan,
des mouettes, des cerfs-volants longs, et des bourrasques informes
comme la part d'ombre qu'il faut vivre.
Toi, tu auras traversé ma vie longtemps, follement, douloureusement.
Nous nous sommes tant aimés.
On voudrait bien détendre le cœur et son chagrin qui ricoche sur les arbres,
grimpe sur les toits,
et saute par-dessus nos vies.
