"Désirant et sidérant, si possible..." dit-elle.


"Désirant et sidérant, ...si possible !" dit-elle.

mardi 30 novembre 2021

Claude Bourgeyx, écrivain, peintre, et ami

 


 

Claude Bourgeyx est mort hier. Impensable pensée qui pourtant mord le dedans de la tête. Nous devions manger ensemble, nous voir. A quand remonte la dernière fois ? En mai dernier, en juin ?  On pense au chemin fait ensemble. 

 J'ai rencontré Claude Bourgeyx en 91. Sud-Ouest publiait alors ses petites chroniques mordantes qui me plaisaient, « Nobody's Perfect » je crois que ça s'appelait comme ça, avec des dessins de Roland Breucker. J'avais lu quelques-uns de ses livres, "Les égarements de Monsieur René" et "L'amour imparfait", alors, au culot, je l'ai appelé. J'avais envie de conduire un atelier d'écriture dans ma classe à l'école des Aubiers. Pour donner voix aux enfants qu'on écoutait si peu alors. Ce fut mémorable, bizarrement plein d'adversités de la part des enseignants, et, par un système de vase communiquant, plein de complicité entre nous.  Notre amitié est née là, exactement à ce moment-là.    

Nous ne nous sommes plus lâchés. De loin en loin, de proche en proche, j'ai continué à le lire, fidèle qu'il était au Castor Astral. J'ai suivi ses débuts de peintre, son travail qui s'élaborait dans son atelier et qui me fascinait, ses expositions, (et j'ai été super fière quand il a voulu une de mes toiles chez lui). J'ai vu ses pièces de théâtre au Pont Tournant, au Globe, ou ailleurs à Bordeaux, car ses pièces étaient jouées dans tas de villes. Le théâtre de Label Étoile a mis en scène ses "Écrits d'amour" en France et en Suisse, plus de cent représentations et 2 festivals d'Avignon. Il racontait. L'admirable Claude Piéplu, Anémone ou la tumultueuse Bernadette Lafont. Il m'a fait lire, un jour de l'an dernier je crois, quelques-uns de ses textes de "Chronique de la chambre 3", dont un en particulier qui avait choqué.

 Claude écrivait sur l'enfance et ses tourments, sur les grandes absurdités des hommes, sur nos failles. Et ses personnages, décalés et absurdes comme l'existence, étaient remplis d'humanité. Ils étaient drôles, faussement drôles, et nous embarquait, par son écriture de la précision et sans caricature jamais, dans la folie qui creuse nos vies. Entre rire et silence. Son talent éclaboussait. Et il n'en faisait pas des caisses. Il n'aimait pas l'entre soi et les cercles qui pensent en rond. Il pensait libre.

J'ai filmé Claude Bourgeyx, quelques lectures, des fragments de pièce, ses toiles à l'Atelier i.d. 109, rue Notre-Dame, chez Danièle Bloch-Bourgade, et son univers original me prenait aux tripes, au corps dans son entier, et au cœur.

Ce matin, je suis encore ainsi, saisie au cœur par le choc de sa disparition et ce qui me manquera désormais : sa présence quelque part dans le monde, sa voix au bout du téléphone quand il s'inquiète pour moi, et puis nos conversations sur la création, et puis nos vies, nos attentions, nos p'tits riens aussi qui font semblant de rien, parce qu'ils sont juste du vivant et de la tendresse.  

Il était ainsi, vivant et tendre.  

Alors, ...la tristesse trace sa route.

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